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9 août 2010 1 09 /08 /août /2010 15:15

Un cliquetis métallique brisa le silence. L'homme ouvrit les yeux.

Peine perdue : la pièce était plongée dans l'obscurité la plus totale. Faute d'éléments visibles auxquels se raccrocher, la réalité n'avait rien de plus tangible que le monde onirique dans lequel il évoluait à longueur de journée. Etait-il vraiment réveillé ? Ou vivait-il un nouveau cauchemar ? Les phases de réveil et de sommeil se succédaient de façon irrégulière, sans transition marquée.

Depuis combien de temps était-il enfermé ici ? Un mois ? Un an ? Le temps ne s'écoulait plus : passé, présent et futur se fondaient en une éternité lancinante. Tout comme sa raison, les souvenirs s'estompaient, perdus dans une brume sinistre et douloureuse. Bientôt, il ne se souviendrait même plus de son nom.

Une faim perpétuelle dévorait ses entrailles, car le tube d'alimentation implanté dans son estomac ne distillait les nutriments qu'avec parcimonie. Certes, il vivait ; mais chaque instant était un supplice. Il s'était longtemps cru doté d'une résolution inaltérable : quelle naïveté ! La souffrance peut éroder la volonté la plus trempée ; tôt ou tard, la dignité d'un homme s'effondre sous le poids des tourments. Il avait tenu longtemps. Mais en fin de compte, il avait cédé, comme bien d'autres avant lui. Ses lamentations avaient alors résonné entre les murs de pierre. Hélas, les gémissements n'avaient eu aucune prise sur la détermination de ses geôliers. Anéantie, son âme s'était depuis lors réfugiée dans le mutisme.

Un nouveau cliquetis se fit entendre. La porte s'ouvrit en grinçant, libérant un rai de lumière sur le visage tuméfié du prisonnier. Par réflexe, celui-ci voulut rabattre un bras devant ses yeux. Aucune réaction : ses membres avaient été amputés depuis bien longtemps. Avec une cruauté experte, ses bourreaux l'avaient dépecé, comme on découpe une pièce de viande. Ils avaient commencé par les premières phalanges, cautérisant les plaies au feu ; puis, séance après séance, les mains, les pieds, les bras, les jambes lui avaient été retirés, jusqu'à ce qu'il ne restât plus de lui qu'un tronc, maintenu en place par des lanières de cuir tellement serrées qu'elles mordaient sa chair.

Une silhouette colossale se détachait sur le fond lumineux. Peu à peu, les yeux du supplicié s'habituèrent à la clarté et reconnurent le visiteur. Le chapelain-investigateur Asmodaï. Une simple robe blanche couvrait son armure de jais, ne laissant apparaître qu'un masque terrifiant sous la capuche.

Le géant s'approcha du prisonnier, chacun de ses pas ébranlant le sol. Son respirateur émit une voix glaciale tandis qu'il se penchait au-dessus de sa victime.


- Inquisiteur Teufelgarten, je suis porteur de mauvaises nouvelles.

Allons bon, quelle surprise. Aucune bonne nouvelle ne lui avait été annoncée depuis sa capture.

- Frère Pertinax a achevé sa mission sur Terra, reprit Asmodaï. Il est parvenu à convaincre l'Inquisition de renoncer à toute représaille contre le Chapitre. Je crains que vos supérieurs ne vous aient abandonné.

Teufelgarten ne répondit pas. Implacable, l'Astartes poursuivit son monologue.

- Vos amis ont échoué, Teufelgarten. Ysabel de Fennakad est en fuite, tandis que les autres membres de votre petit groupe se livrent à des guerres d'influence fratricides. Mieux : je viens d'apprendre que l'Inquisiteur Philistin avait été sauvagement assassiné. C'était l'un de vos plus fidèles amis, je crois.

Ignorant sa mâchoire fracturée, Teufelgarten serra les dents pour contenir sa frustration. Philistin, mort ? Ysabel, en fuite ? Il avait secrètement entretenu l'espoir que ses disciples le délivreraient. Ou, à défaut, qu'ils le vengeraient. Leur échec signifiait la perte de tout espoir. Et l'anéantissement de décennies de travail. Dire qu'il avait été si près du but !

Une larme coula sur la joue desséchée de l'Inquisiteur. Visiblement satisfait, Asmodaï se redressa et se dirigea vers la porte d'un pas lourd.


- Attendez, croassa Teufelgarten.

Le chapelain-investigateur se figea. Lentement, il tourna la tête vers l'homme-tronc.


- Vous avez gagné, Asmodaï, reprit l'Inquisiteur d'une voix faible. Je suis vaincu. Je n'ai plus rien, ni honneur, ni but, ni amis, ni espoir. Je ne suis plus qu'une carcasse vide aux limites de la folie, et je doute que vous puissiez encore tirer quelque amusement de moi. A quoi bon poursuivre tout ceci ? Finissons-en. Tuez-moi.

Les mains sur les hanches, Asmodaï secoua la tête. N'eût été le masque noir, il aurait paru sincèrement attristé.

- Teufelgarten, vous ne comprenez pas. Je ne prends aucun plaisir à vous apporter des tourments sans fin. Il s'agit là de mon rôle, de mon devoir envers le Chapitre, et mes sentiments personnels n'entrent pas en ligne de compte. Nous autres Dark Angels estimons que les pécheurs doivent être châtiés. Il s'agit de justice, non de vengeance. Vous avez commis un grand crime, Teufelgarten, et pour atteindre la rédemption, vous devrez expier vos fautes pour l'éternité.

L'Inquisiteur poussa un cri de rage et de désespoir, qui se conclut bien vite par une quinte de toux sanglante. Des larmes amères ruisselaient sur son visage.

Lentement, Asmodaï quitta la pièce et referma la lourde porte. Le Dark Angel fit coulisser les verrous et se dirigea vers la cellule suivante.




FIN

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27 juillet 2010 2 27 /07 /juillet /2010 09:54

Tapi dans la fraîcheur du soir, le Thunderhawk attendait paisiblement son heure. Au-dessus de la rampe frontale abaissée, la pâle lueur des affichages irradiait de la verrière blindée comme un halo fantomatique ; enveloppés de volutes de fumée, les moteurs du monstre ne laissaient échapper qu'un discret sifflement de turbines.

Pertinax attendait, lui aussi. Debout devant la plate-forme, immobile, le Grand Maître observait la scène en silence. Le hangar était ceint de hautes cloisons de plastacier, mais les antennes et les tours de défense n'en étaient pas moins visibles au-delà de ces parois symboliques. Tout autour de lui, dans d'innombrables hangars en tous points similaires, Pertinax pouvait imaginer l'activité grouillante de l'astroport : d'innombrables dockers, serviles, chargeant et déchargeant les chaloupes de transport ; les équipages s'activant autour de leur appareil pour en vérifier le bon fonctionnement ; des passagers de haut rang embarquant à destination de quelque monde éloigné. Il n'en résultait pourtant qu'un vague bruit de fond, tout juste interrompu de temps à autre par le décollage d'un vaisseau ou le rugissement éphémère d'une patrouille de chasse dans le lointain.

Le Dark Angel effleura pensivement la crosse de ses Sunfury. Soigneusement rangés dans leurs étuis de cuir, les deux pistolets étaient à peine perceptibles, mais Pertinax se félicitait de leur retour comme de celui d'un être cher longtemps disparu.

Une silhouette apparut soudain dans l'encadrement de la porte. Vêtue d'une robe ample à large capuche, elle jeta un coup d'oeil furtif de gauche et de droite avant de s'aventurer dans le hangar. Pertinax la regarda s'approcher sans mot dire.


- Votre appareil est-il prêt à décoller ? demanda Mantis.

Le Grand Maître ne répondit pas. Il avait ses propres questions.


- Et Fennakad ?

- Hors d'état de nuire. Après une telle humiliation, elle ne pouvait connaître que la disgrâce... ou l'exil. La révolte gronde au sein même de sa faction ; beaucoup de ses anciens amis la considèrent comme responsable de leur échec et comptent bien l'évincer définitivement. Aux dernières nouvelles, elle aurait déjà quitté Terra.

- Les partisans de Teufelgarten ne risquent-ils pas de se doter d'un nouveau meneur et de reprendre leur croisade de plus belle ?

- Non, il est peu probable qu'ils puissent se relever d'un coup pareil. Le vote du Concile était sans équivoque : pour moi, l'Inquisition a clairement affiché son soutien aux Dark Angels. Revenir sur cette décision serait se dédire. Par ailleurs, le groupuscule fondé par Teufelgarten ne survivra certainement pas aux conflits internes qui le déchirent.

- Bien. Le Chapitre est donc à l'abri pour quelques siècles.

- En effet. Je crois avoir rempli ma part du contrat.

Les deux hommes se regardèrent en silence.

- Avez-vous fait le nécessaire ? s'enquit Pertinax.

- Oui. J'ai confié des lettres à mes plus fidèles assistants, avec pour consigne de ne pas les transmettre aux Ordos avant trois jours. Ainsi, lorsque la vérité éclatera, nous serons déjà loin. Et bien évidemment, nul ne sait que je pars avec vous.

Mantis esquissa un sourire. Un sourire franc et sincère, dénué de la mélancolie si coutumière au vieil homme.

- Je vous suis, mon ami, lança-t-il avec entrain. En route pour le Roc !

A cet instant, plusieurs dizaines d'hommes en armes se ruèrent à travers la porte du hangar dans un grand bruit de bottes. Leur livrée rouge et noire ne laissait aucun doute quant à leur allégeance : par escouades entières, les troupes inquisitoriales prenaient possession des lieux.

- Emparez-vous de cet homme, ordonna Pertinax.

Deux soldats encadrèrent solidement Mantis, se saisissant de ses bras pour l'empêcher de dégainer son pistolet d'ordonnance. Dans le même temps, d'autres gardes pointaient leurs fusils sur le vieillard de façon menaçante. Stupéfait, l'Inquisiteur restait bouche bée : plus encore que la surprise, son visage reflétait l'incompréhension.

Le gros de la troupe s'écarta, ouvrant le passage à un nouvel arrivant. A en juger par la déférence que lui témoignaient les soldats de choc, il devait commander le détachement. L'absence d'uniforme le désignait comme un représentant des Ordos plutôt que comme un officier. Pourtant, il paraissait trop jeune pour bénéficier du titre d'Inquisiteur.


- Emmenez-le.

- A vos ordres, Messire Mazen.

Les troupes obéirent sans sourciller, traînant le vieillard vers la sortie. Mantis voulut se débattre, mais ses gardiens le bousculèrent sans ménagement ; Mantis parvint néanmoins à tourner la tête vers le Dark Angel.

- Pertinax, vous n'êtes qu'un traître ! Un lâche et un traître !

Mazen gratifia le prisonnier d'un sourire satisfait tandis que les troupes inquisitoriales l'emmenaient au-dehors.

- Ce vil hérétique connaîtra bientôt un sort pire que la mort.

- Vous avez donc mis la main sur ses lettres ? demanda Pertinax.

- A l'heure où nous parlons, les appartements de Mantis sont soumis à une fouille approfondie. Avec ces preuves, sa condamnation ne sera qu'une formalité. Evidemment, ses suivants seront soumis à la Question et exécutés, eux aussi.

Mazen se retourna vers le Grand Maître. Il exultait.

- Avec l'arrestation de ce misérable, ma promotion au rang d'Inquisiteur ne fait plus aucun doute. Merci pour votre aide, Pertinax. De toute évidence, je vous avais mal jugé.

- Ce fut un plaisir, mentit l'officier.

L'adepte hocha la tête avec emphase et emboîta le pas à ses hommes. Pertinax fit volte-face, se dirigeant vers le Thunderhawk d'un air décidé.

Le Dark Angel fit signe au pilote et s'engagea sur la rampe ; une note sifflante s'éleva en un puissant crescendo tandis que les moteurs étaient mis à feu. Puis, alors que Pertinax agrippait l'échelle et se hissait vigoureusement à l'étage supérieur, de puissants vérins scellèrent la porte avant.

Le pilote et le copilote saluèrent brièvement l'arrivée du Grand Maître dans le cockpit avant de se retourner vers la verrière. L'appareil entamait déjà son ascension vertigineuse, fonçant à travers la couverture nuageuse comme une flèche d'acier. Pensif, Pertinax s'assit à la place du radio-navigateur.

Azrael serait content. Les Dark Angels étaient lavés de tout soupçon ; les ennemis du Chapitre au sein de l'Inquisition étaient réduits à l'impuissance. Oui, Azrael avait raison : la réputation de la IIIe Unité d'Assaut Planétaire avait constitué un atout de poids pour emporter l'adhésion finale du Concile. Quant à ce jeune imbécile de Mazen, qui aurait pu chercher à se venger de Pertinax, il n'éprouvait plus désormais que de la gratitude envers son ennemi d'hier.

Curieusement, les pensées du Grand Maître revinrent à Mantis. Pertinax en fut irrité : l'Inquisiteur n'avait que ce qu'il méritait. Comment avait-il pu croire que les Dark Angels se laisseraient acheter de la sorte ? Certes, l'aide du vieillard s'était avérée précieuse, mais l'homme n'avait agi que par intérêt. Le Grand Maître avait suivi la voie de la raison : accueillir Mantis sur le Roc aurait pu attirer les foudres de Terra sur les Impardonnés ; tandis qu'en le dénonçant, Pertinax dissipait les derniers doutes de l'Inquisition à son égard et créait une diversion fort à propos. De toute façon, la théorie scandaleuse de Mantis le désignait comme un hérétique et un traître à l'Imperium. Le laisser vivre aurait été le plus inqualifiable des crimes.

Les nuages se dissipèrent peu à peu tandis que le Thunderhawk s'extirpait des hautes couches de l'atmosphère. La voûte céleste fit son apparition, constellée d'étoiles et de vaisseaux en orbite. Le Thunderhawk infléchit sa trajectoire, virant droit sur un croiseur qui l'attendait au-delà de l'horizon.

Un doute effrayant se fit jour dans l'esprit de Pertinax : et si Mantis avait raison ? Si l'Empereur était bel et bien mort ? L'Humanité serait alors orpheline, perdue à jamais dans la vénération d'un cadavre sans âme. Abandonnée à elle-même, condamnée à une stagnation éternelle, elle poursuivrait une course sans but et sans espoir.

Le regard de Pertinax se perdit dans les étoiles. Une vision habituellement réconfortante : le Dark Angel les avait toujours perçues comme un vaste territoire à conquérir, comme une promesse d'honneur et de gloire au service de l'Empereur. Pour la première fois, il les découvrait effrayantes et glaciales. L'Humanité avançait dans le noir, inconsciente des dangers qui la guettaient.

Malgré tous ses efforts, Pertinax se sentit gagné par une sombre angoisse.


A suivre...

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19 juin 2010 6 19 /06 /juin /2010 11:47

- Mes très chers frères, mes très chers soeurs, soyez les bienvenus en ce second jour du Concile de la Très Sainte Inquisition.

Comme si ces mots avaient marqué la fin des réjouissances préliminaires, les derniers Inquisiteurs encore debout daignèrent enfin gagner leurs sièges attitrés et s'asseoir. Pour autant, ce signal convenu ne parvint pas à les discipliner tout à fait, et la plupart des membres de l'assistance poursuivirent leur conversation sans même baisser la voix.

Imperturbable, le maître de cérémonie continuait à parler comme si de rien n'était. Magnifiée par des vocaliseurs argentés, sa voix suave se répercutait dans l'amphithéâtre avec une douceur tonitruante qui ne parvenait qu'à grand-peine à dominer le brouhaha ambiant.


- Mes amis, nous devons hélas déplorer la perte de notre révéré confrère, l'Inquisiteur Teufelgarten, porté disparu tandis qu'il menait une investigation pour le compte de l'Ordo Hereticus. Nous le pleurerons longtemps et amèrement, mais dans notre peine infinie, nous trouverons néanmoins un réconfort dans la certitude que sa loyauté et sa détermination lui auront valu une place amplement méritée à la droite du Saint Empereur de l'Humanité.

Un silence respectueux s'était abattu sur le grand amphithéâtre. Si les Inquisiteurs se souciaient comme d'une guigne du devenir d'un monde reculé ou de l'agonie d'une civilisation lointaine, la mort d'un des leurs les touchait bien plus durement. Que leur propre sécurité puisse être menacée leur apparaissait comme un véritable sacrilège.

L'espace d'un instant, le visage inflexible de l'orateur fut éclairé par un léger sourire tandis qu'il savourait ce petit triomphe : capter l'attention d'un auditoire aussi difficile n'était pas une mince affaire et pouvait s'apprécier à sa juste valeur. Mais le devoir était appelé à prendre le dessus, aussi le maître de cérémonie poursuivit-il son discours sans plus attendre.


- L'Inquisiteur Teufelgarten était en tournée d'inspection sur le Roc, la forteresse spatiale mobile du Chapitre des Dark Angels. Nous avons reçu un message signalant son arrivée sur place, puis plus rien.

Tous les regards convergèrent vers l'Astartes en armure de sinople et d'or qui se tenait au premier rang.

- Par un hasard extraordinaire et providentiel, un officier Dark Angel de haut rang est actuellement en pèlerinage sur Terra. Il a accepté notre invitation amicale et pourra peut-être nous apporter quelques éclaircissements à ce sujet. Grand Maître Caius Pertinax, la parole est à vous.

Pertinax se leva et salua l'orateur d'un léger hochement de tête. Tirant parti des leçons de la veille, le Grand Maître avait gardé son heaume ; l'assistance pourrait le prendre comme un affront ou un déni de reconnaissance, mais Pertinax n'en avait cure.

- L'Inquisiteur Teufelgarten et sa suite se sont en effet présentés au Roc pour y procéder à une inspection des plus ordinaires. Bien entendu, nous avons accueilli ce digne représentant de la Très Sainte Inquisition avec les égards et le respect dus à un personnage de son rang, et toutes nos portes se sont ouvertes à sa demande. Au cours de sa visite, le Seigneur Teufelgarten a pu constater que le Chapitre des Dark Angels disposait de forces militaires considérables, et notamment d'une flotte de guerre particulièrement puissante qui lui confère une totale liberté de mouvement. Il a également pu vérifier que le Roc était non seulement mobile, mais aussi inexpugnable.

Pertinax marqua une pause pour s'assurer que l'Inquisition avait bien perçu la menace voilée qui exsudait de ses propos. Non seulement il rappelait à l'Inquisition que le Chapitre jouait un rôle de premier plan dans la défense d'un Imperium assiégé de toutes parts, mais de plus il laissait entendre que toute velléité de purge se heurterait à une vive résistance armée.

Les murmures reprirent dans l'assistance, ponctués par quelques grognements désapprobateurs. Sans laisser rien paraître de sa satisfaction, Pertinax reprit.


- Au terme des trois jours prévus pour son inspection, l'Inquisiteur Teufelgarten a souhaité prendre congé à bord de son vaisseau personnel. Or, les hangars et les arsenaux du Roc sont enfouis au plus profond d'une cavité creusée dans la roche afin de les protéger contre tout bombardement ; entrée comme sortie nécessitent une navigation extrêmement précise au travers des tunnels d'accès. Il s'agit là d'un exercice des plus périlleux, même pour les pilotes hautement qualifiés de la Très Sainte Inquisition. Comme l'appareil du Seigneur Teufelgarten avait déjà frôlé la collision lors de son arrivée au Roc, nous avons proposé de le faire accompagner par un serviteur de navigation aguerri à cette manoeuvre difficile. Hélas, il a refusé. Et à notre grand chagrin, le vaisseau inquisitorial s'est écrasé contre une paroi.

Les murmures s'amplifièrent, cependant que les grognements se muaient en cris de protestation. Certains Inquisiteurs n'accordaient aucune foi à la version de Pertinax et le faisaient bruyamment savoir. Le maître de cérémonie dut hausser la voix pour dominer la révolte naissante de l'amphithéâtre survolté.

- Ainsi donc, notre confrère et ami a péri dans un tragique accident. Voilà qui répond à nos interrogations et clôt le débat.

Mais tous ne l'entendaient pas de cette oreille. Un Inquisiteur d'âge mur, entièrement vêtu de pourpre et de gris, se leva soudainement pour s'arroger la parole.

- Messire Pertinax, vous nous dites que Teufelgarten menait une simple inspection. Je crois pour ma part qu'il se livrait à une enquête bien plus spécifique. Et que sa disparition, loin d'être accidentelle, l'a empêché de nous livrer des vérités fort compromettantes pour votre Chapitre.

Pertinax répondit sans se retourner.

- Si j'en crois le message par lequel l'Inquisiteur Teufelgarten nous a avisés de son arrivée, sa venue était bel et bien motivée par une simple inspection. Voulez-vous dire qu'il nous aurait sciemment caché ses véritables intentions ? J'ai peine à croire qu'un homme aussi intègre et aussi droit qu'un Inquisiteur puisse recourir à la tromperie.

- Personne ne pratique mieux la tromperie que vous autres Dark Angels. Votre histoire est jalonnée de zones d'ombres, et vous couvrez chacune de vos actions d'une chape de silence pour mieux dissimuler vos agissements.

- La discrétion nous est imposée par des nécessités militaires. Il serait malséant d'exposer la stratégie de l'Empereur aux ennemis de l'Humanité.

Un second Inquisiteur se leva. Très âgé, tout couturé de cicatrices, il faisait figure de vétéran et avait de toute évidence une solide expérience des batailles.

- Les autres forces armées de l'Imperium seraient-elles à classer parmi les ennemis de l'Humanité ? A de nombreuses occasions, vos troupes se sont détournées de l'objectif commun assigné par le Haut Commandement Impérial pour suivre des objectifs propres et pour le moins mystérieux. Sur Kossell, plusieurs milliers de braves ont péri lors de la contre-offensive des rebelles, parce qu'ils avaient été abandonnés par les Dark Angels supposés les appuyer.

- Notre Chapitre reçoit ses ordres de l'Empereur et de Lui seul, aussi nos corps expéditionnaires ne collaborent-ils avec les autres unités que dans la mesure où cela est compatible avec leur propre mission. Cependant, lorsque les circonstances l'exigent, nous pouvons placer des troupes sous la juridiction directe du Haut Commandement Impérial. Il en est ainsi de la IIIe Unité d'Assaut Planétaire que j'ai l'honneur et le privilège de commander.

Des hochements de tête épars marquèrent l'approbation de quelques spectateurs. Azrael avait raison : les campagnes de Pertinax et de la IIIe leur avaient valu une bonne réputation auprès des instances militaires de Terra. Mais il en fallait plus pour désarçonner le vieil Inquisiteur, qui répondit du tac au tac.

- Vous êtes prompt à vanter les mérites de votre IIIe Unité d'Assaut Planétaire, mais vous n'êtes pas exempt de critiques, messire Pertinax. Ainsi, lors de la conquête de T'au Phal'ab, vous n'avez pas hésité à lancer une offensive contre vos alliés et à détruire la totalité d'une compagnie du XXIe Steel Dragons, une unité d'élite de la Garde Impériale.

- Le régiment auquel vous faites allusion avait fraternisé avec les infâmes Tau et menaçait de mettre ses blindés lourds au service de ses nouveaux maîtres xenos. Comme le Haut Commandement hésitait à ordonner l'ouverture du feu, j'ai pris l'initiative d'éliminer ces traîtres avant que leur exemple n'incite d'autres soldats impériaux à prendre fait et cause pour l'ennemi. T'au Ph'alab est tombée quelques semaines plus tard.

- Le problème tient moins du fond que de la forme : vous avez mené cette attaque de votre propre chef, sans même en aviser le Haut Commandement Impérial. Et il ne s'agit pas d'un phénomène isolé : les Dark Angels ont élevé cette détestable pratique au rang de coutume. Que vous deviez répondre à vos propres ordres est une chose ; que vous entreteniez un tel secret autour de vos actions en est une autre.

- Nous n'avons aucun secret pour la Très Sainte Inquisition. Nos archivistes consignent chacune de nos campagnes dans leurs registres, et tout Inquisiteur dûment mandaté pourra librement consulter ces documents sur le Roc.

- A moins qu'il ne disparaisse en chemin, bien sûr.

- Je suis persuadé que la Très Sainte Inquisition sera dorénavant très vigilante quant au choix de ses navigateurs. Tout risque d'accident sera ainsi écarté.

Comme son confrère ne répondait pas, le premier contradicteur de Pertinax reprit la parole.

- Et moi, je persiste à dire que les Dark Angels nous cachent bien des choses. Votre manie du secret vous pousse à commettre les actes les plus criminels. Pourquoi ? Quels sombres activités dissimulez-vous à votre Empereur ?

Cette fois-ci, Pertinax se retourna lentement et planta ses yeux dans ceux de l'Inquisiteur. Il haussa le ton, écrasant l'amphithéâtre sous le fracas de sa voix métallique.

- Mon Chapitre sert l'Empereur avec dévouement depuis plus de cent siècles. Comment osez-vous proférer de telles accusations sans preuves ?

L'homme découvrit les dents en un large sourire carnassier.

- Mais j'ai des preuves, messire Pertinax. Maître de la Foi Thargannis, du Chapitre des Black Templars, je vous cède la parole.



A suivre...

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17 juin 2010 4 17 /06 /juin /2010 18:21

Avec un soupir de contentement, l'adepte Mazen porta le verre à ses lèvres. Il mit tous ses sens en éveil tandis que le liquide ambré coulait lentement au fond de sa gorge. Un parfum douçâtre, une sensation de brûlure fugace, et ce fut tout : en fin de compte, cet alcool avait un goût plutôt désagréable. Mais il coûtait une véritable fortune, ce qui suffisait largement à Mazen.

L'adepte reporta son attention sur la baie vitrée. De forme ogivale, encadrée de rideaux de soie, elle se dressait sur une hauteur invraisemblable, comme pour écraser les visiteurs de son gigantisme. Au-delà du verre blindé, des formes indistinctes se dessinaient dans la nuit et le brouillard ; de temps à autre, un éclair venait déchirer l'obscurité, découpant la silhouette des tours gothiques en ombres chinoises.

Oui, seconder un Inquisiteur présentait nombre de risques. Certains y laissaient leur vie ; d'autres échouaient, jugés incapables d'accéder à la magistrature suprême. Mais pour prix de ce travail ingrat, au bout d'un chemin difficile et semé d'embûches, il y avait le pouvoir. Le pouvoir ! Bientôt, Mazen serait un Inquisiteur à part entière ; bientôt, il pourrait disposer à loisir de la vie de quiconque et décider sur un caprice de vitrifier la surface d'un monde.

Le jeune homme s'autorisa un rire satisfait et balaya la pièce du regard. A vrai dire, il n'avait même pas besoin d'attendre : en l'absence de son maître, il héritait de toutes ses prérogatives et bénéficiait de tous ses privilèges, au premier rang desquels figurait cette suite luxueuse, nichée dans les flancs de la forteresse inquisitoriale.


- Monseigneur, veuillez pardonner mon intrusion. Vous avez un visiteur.

Mazen se retourna vers la lourde porte et fusilla le serviteur du regard.

- A cette heure-ci ? Renvoie-le d'où il vient. Et ne t'avise plus de me déranger, misérable larve, ou je te ferai exécuter.

- Bien, monseigneur.

Penaud, le majordome mécanisé sortit à reculons et referma la porte derrière lui. Mazen resta un instant stupéfait par l'audace du serviteur : l'interrompre en plein travail malgré des ordres explicites ! Si le petit personnel commençait à prendre ses aises, comment Mazen pourrait-il se consacrer efficacement à sa tâche ? Le jeune homme décida qu'il ferait remplacer le majordome dès le lendemain.

Mazen reposa le verre vide avant de se diriger vers la bibliothèque d'un pas nonchalant. Des centaines d'ouvrages s'étalaient sur les rayonnages de bois précieux : la collection personnelle de l'Inquisiteur Jovena était un véritable trésor en soi. Certains grimoires constituaient le dernier témoignage d'une culture ou d'un courant de pensée condamné aux flammes ; d'autres traitaient des sciences occultes et des mystères insondables de l'Empyrean ; mais tous présentaient une facette de l'hérésie, ce monstre protéiforme que la Très Sainte Inquisition se devait de combattre pour l'Eternité.

L'adepte tendit la main pour caresser la reliure patinée d'un traité de linguistique eldar. Un ouvrage rarissime, qui ne subsistait qu'à quelques exemplaires dans tout l'Imperium depuis qu'un édit inquisitorial l'avait désigné pour l'autodafé.

Mazen sursauta lorsque la porte s'ouvrit à nouveau. Excédé, il laissa libre cours à sa colère.


- Sombre crétin, je croyais avoir été cl...

Le jeune homme s'interrompit, stupéfait. Devant lui se dressait la silhouette immense d'un Astartes en armure.

- Caius Pertinax ? Que faites-vous là ?

Le Dark Angel referma doucement la porte.

- J'ai quelques questions à vous poser, Mazen.

L'adepte écarquilla les yeux.

- Des questions ? Et qui croyez-vous être pour me poser des questions ?

En guise de réponse, Pertinax plongea la main sous sa cape et exhiba un objet métallique fuselé.

- Je suppose que vous reconnaissez ceci ?

Mazen fonça les sourcils.

- Une matraque énergétique ? Comment osez-vous pénétrer ici avec une telle arme ? Je vais immédiatement alerter la...

- Sachez qu'il est très imprudent d'attenter à la vie d'un officier de l'Adeptus Astartes. Mon Chapitre n'appréciera guère vos manigances et les prendra comme une provocation.

- Quelles manigances ? Je ne vois pas de quoi vous parlez.

D'un pas lourd et déterminé, Pertinax avança vers Mazen, tout en activant la matraque qui se mit à bourdonner de façon inquiétante.

- Cette arme est rare, Mazen, très rare. En dépit de ses qualités, elle n'est utilisée que par l'Adeptus Arbites, car ses facultés non létales ne présentent que peu d'intérêt pour les militaires. Bien sûr, lorsque des Arbites sont tués en mission, il peut arriver qu'une matraque tombe entre les mains de la pègre, auquel cas elle prend rapidement une grande valeur marchande.

Mazen restait de glace. Les bras croisés, il dévisageait le Dark Angel sans se démonter. Pertinax vint se planter devant l'adepte et lui présenta la matraque.

- Mais cette arme-ci ne présente aucun marquage, poursuivit l'officier. Ni numéro de série, ni unité d'appartenance. Elle n'est jamais passée entre les mains de l'Adeptus Arbites. De toute évidence, elle a été prélevée directement dans les arsenaux généraux de Terra.

- Mais enfin, que signifie tout ceci ? De quoi parlez-vous donc, par l'Empereur ?

- Ne blasphémez pas.

Pertinax apposa doucement l'extrémité de l'arme contre la jambe de Mazen. La décharge d'électricité émit un claquement sec, et le jeune homme s'effondra dans un cri.

- Vous êtes complètement fou, Pertinax ! Vous venez de signer votre arrêt de mort !

Haletant, Mazen tentait de se relever. Mais sa jambe gauche restait engourdie ; de petits éclairs résiduels continuaient à danser le long de sa cuisse. Imperturbable, Pertinax poursuivit son raisonnement.

- Qui pouvait avoir accès aux stocks d'armes de l'Arbites ? Qui pouvait connaître avec précision l'organisation du Concile ? Qui pouvait vouloir capturer un Astartes et doter une fausse bande de voyous d'un armement particulièrement adapté à cette tâche ? Un membre de l'Ordo Hereticus. Tout vous désigne, Mazen.

- Vous croyez que j'aurais pu organiser un attentat contre vous ? Pourquoi aurais-je fait cela ?

- C'est justement ce que je souhaite savoir.

Mazen esquissa un sourire sans joie.

- Pertinax, je vous répète que je ne suis au courant de rien.

Sans un mot, le Grand Maître appliqua la matraque sur la nuque de son interlocuteur, qui fut instantanément foudroyé. Mazen chuta de tout son long, les membres agités de soubresauts.

Pertinax le saisit d'une seule main et le traîna vers la baie vitrée. Le jeune homme était tout à fait paralysé désormais ; ses membres pendaient lamentablement pour lui donner l'apparence d'une poupée de chiffon. Seuls les muscles de son visage répondaient encore à sa volonté. En l'occurrence, ils exprimaient la plus vive angoisse.


- Bon sang, Pertinax, qu'avez-vous l'intention de faire ?

Le Dark Angel ne répondit pas. D'un geste du poignet, il fit pivoter le verrou et libéra les battants de la fenêtre, qui s'ouvrit à la volée. Un vent furieux se précipita dans la pièce, soulevant la cape mutilée de l'Astartes et s'engouffrant dans les interminables rideaux de soie. L'étoffe sembla prendre vie, voletant furieusement dans la suite comme une paire de serpents rougeoyants.

Tenant son fardeau à bout de bras, Pertinax s'aventura sur le balcon. Tombant à point nommé pour saluer son apparition derrière la rambarde d'airain, la foudre illumina le ciel, soulignant l'aspect sinistre de son heaume par un terrifiant jeu de clairs-obscurs.

L'officier souleva Mazen et le jeta sans ménagement sur la rambarde. Le haut du corps pendait mollement à l'extérieur, les bras ballants, seulement retenu par le poids des jambes. En-dessous du balcon, les murs de la forteresse s'enfonçaient dans les ténèbres nuageuses. La surface grouillante de Terra n'était pas discernable, mais elle était bien là, tapie à une profondeur insondable.


- Je vous écoute, Mazen.

- Vous vous apprêtez à commettre un meurtre ! Tuez-moi, et vous connaîtrez les pires tortures avant de périr dans les affres de l'agonie !

- Il ne s'agira pas d'un meurtre, mais d'un suicide. La matraque énergétique neutralise les terminaisons nerveuses en saturant les synapses, mais elle ne laisse aucune séquelle : vous aurez malencontreusement glissé sur le balcon.

- Pertinax, pour la dernière fois : je ne peux pas vous dire ce que je ne sais pas !

Le Grand Maître fit basculer Mazen dans le vide, le rattrapant in extremis par la cheville. Le jeune homme poussa un cri d'horreur. Il se balançait au-dessus du néant.

- Ma patience a des limites, Mazen.

- Attendez, attendez !... Je crois deviner ce qui vous est arrivé. Je suis peut-être en mesure de vous éclairer sur certains points.

- Parlez.

- Et qui me dit que vous me laisserez la vie sauve ? Je ne suis pas stupide : dès que vous aurez entendu ce que j'ai à dire, vous me tuerez.

- C'est une éventualité probable, en effet. Mais si vous observez le silence, je vous tuerai de façon certaine.

- Sauf que si vous me tuez maintenant, vous ne saurez rien.

- Certes, mais ce ne serait pas pas dramatique. Ces informations ne revêtent aucun caractère vital à mes yeux ; je désire simplement satisfaire ma curiosité. En revanche, vous tuer me procurerait un certain plaisir.

Mazen hésita un court instant.

- Vous disposez d'arguments convaincants, Pertinax.

Le jeune adepte reprit son souffle avant de continuer. Gagné par le vertige, il parlait les yeux fermés.

- Je suppose que l'Inquisition cherche à recueillir autant d'informations que possible avant votre procès.

- Mon procès ? Ne suis-je pas ici en qualité d'invité ?

- Officiellement, si. C'est bien pour cela que vous ne pouviez pas être interrogé comme un simple manant. Il fallait sauver les apparences et recourir à des moyens détournés. En général, l'Ordo utilise un ou plusieurs psykers pour sonder l'esprit de l'accusé ; lorsque cela ne suffit pas, il est possible d'organiser un enlèvement pour soumettre l'accusé à la Question.

- C'est absurde. Que les informations ainsi recueillies soient utilisées au cours du procès, et l'accusé saura immédiatement que son enlèvement était le fait des Ordos !

- Bien sûr, mais il ne pourra pas le prouver. Tant qu'un fait n'est pas prouvé, il n'est pas recevable devant l'Inquisition.

Pertinax rumina cet argument. Telle était l'hypocrisie dans laquelle se vautraient les laquais de l'Inquisition : les actes les plus inqualifiables pouvaient être commis au vu et au su de tous, sans que quiconque ne trouvât à y redire ; tant que les apparences étaient sauves, chacun acceptait implicitement de souscrire à ce jeu de dupes.

- Ainsi, l'Inquisition souhaite rendre les Dark Angels responsables de la disparition de Teufelgarten ?

- Bien sûr ! Votre Chapitre traîne une réputation sulfureuse, il serait dommage de laisser passer une telle occasion de le mettre en porte-à-faux.

Le Grand Maître ne répondit pas. Un silence pesant s'établit entre les deux hommes, seulement interrompu par de vives bourrasques ; suspendu entre ciel et terre, Mazen attendait son destin avec résignation.

Pertinax ramena le jeune homme sur le balcon et le traîna à l'intérieur. Puis il désactiva la matraque et la jeta à travers la fenêtre ; l'arme disparut dans le néant.


- N'espérez pas un témoignage de gratitude larmoyante de ma part, Pertinax. Vos actes seront rapportés en haut lieu. Vous paierez le prix fort pour ce que vous venez de faire.

Saisissant Mazen par la gorge, Pertinax le souleva comme un jouet.

- Tant qu'un fait n'est pas prouvé, il n'est pas recevable devant l'Inquisition. Ce sera votre parole contre la mienne.

- La parole d'un simple guerrier contre celle d'un Inquisiteur ? L'issue ne fait aucun doute.

Pertinax ramena le visage de l'adepte contre le sien. Les lentilles de son heaume brillaient d'une lueur rouge sang dans la pénombre.

- Vous n'êtes pas un Inquisiteur, Mazen. Pour l'heure, vous n'êtes rien ; aux yeux de vos maîtres, vous n'avez pas plus de valeur que le majordome qui garde votre porte.

Le Dark Angel détendit le bras, projetant le jeune homme dans les airs. Le corps inerte retomba sur le lit à baldaquins, où il rebondit plusieurs fois avant de s'immobiliser dans une pose grotesque.

Pertinax se dirigea vers la porte. Il aurait déjà fort à faire pour justifier la disparition de Teufelgarten ; éliminer ce jeune prétentieux ne ferait qu'offrir un argument de plus à ses détracteurs. Pour l'heure, il devait regagner ses appartements. La nuit serait courte, et la seconde journée du Concile, décisive.



A suivre...

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9 juin 2010 3 09 /06 /juin /2010 09:07

Pertinax ne jugea pas utile de répondre. Il s'interrogeait sur les motivations de ses agresseurs. Avait-il affaire à de simples voyous des bas-fonds ? Qu'une arme aussi rare et onéreuse qu'un pistolet à plasma se retrouve entre les mains d'un petit chef de bande avait quelque chose de dérangeant. Il s'agissait plus vraisemblablement de membres du crime organisé : même sur la Sainte Terra, la pègre régnait insidieusement sur les zones d'ombre de la société impériale, et force était de reconnaître qu'une assemblée d'Inquisiteurs constituait une cible tentante pour qui convoitait la fortune des Ordos. Il suffisait de dépouiller une seule victime pour s'octroyer plus de richesses et d'artefacts de valeur qu'en une vie entière de rapines.

D'un coup d'oeil, Pertinax jaugea la distance qui le séparait du bâtiment principal : celui-ci était bien trop éloigné pour que les troupes inquisitoriales puissent intervenir. De toute façon, les gardes étaient postés à l'intérieur, répartis sur les différents accès de l'amphithéâtre pour en interdire le passage à tout visiteur indésirable. Le jardin lui-même ne bénéficiait d'aucune surveillance, aussi les bandits n'avaient-ils eu aucun mal à préparer leur embuscade.


- Eh bien, tu as perdu ta langue, on dirait ? ricana le meneur. Ah, ces Astartes ! Toujours prêts à jouer les fiers à bras sur les champs de bataille, hein ? Mais une fois privés de votre escorte de larbins, vous ne valez pas tellement mieux que nous.

D'un mouvement du menton, il désigna le Grand Maître à ses acolytes.

- Sebka, Belisarius, occupez-vous de notre héros avant qu'il ne prenne ses jambes à son cou !

Les cinq hommes de main éclatèrent d'un rire aussi gras que malsain. Deux d'entre eux se détachèrent du cercle et avancèrent lentement vers Pertinax, brandissant leur arme énergétique pour parer à toute éventualité.

Le Dark Angel balaya la scène du regard. Quatre armes de poing étaient braquées sur lui, dont un pistolet à haut pouvoir pénétrant. Quel dommage que ses hôtes inquisitoriaux l'eussent privé de ses Sunfury ! Il aurait pu dégainer en un éclair et abattre toute la bande sans coup férir.

Le dénommé Belisarius était un géant musculeux à la mine patibulaire, et même si son visage ne témoignait pas d'une intelligence éclatante, l'homme était presque aussi imposant qu'un Astartes ; Sebka, lui, affichait une constitution plus ordinaire, mais son regard torve ne présageait rien de bon. Tous deux disposaient d'une matraque énergétique, susceptible de paralyser n'importe quel adversaire en quelques décharges. Prudents, ils arrivaient sur le Grand Maître par deux côtés opposés, afin de se protéger mutuellement tout en bénéficiant de la couverture de leurs camarades. De toute évidence, les deux brigands avaient pour consigne de neutraliser leur victime plutôt que de la tuer.

Ils n'en eurent pas le temps.

Pertinax fit un pas de côté, plaçant Belisarius entre lui et le chef de bande. Dans le même temps, sa cape se souleva tandis qu'il expédiait le tranchant de sa main dans la gorge de Sebka. Le gantelet blindé défonça la carotide du criminel et poursuivit sa course jusqu'à la colonne vertébrale, qui se rompit dans un craquement épouvantable. Le malheureux s'effondra sans un cri.

En réponse, les bandits ouvrirent le feu, saturant l'air de rayons meurtriers. Plusieurs tirs atteignirent le Grand Maître de plein fouet et ricochèrent sur son armure ; d'autres le manquèrent et vinrent frapper Belisarius qui se ruait au combat pour venger son compagnon. Criblé d'impacts, le molosse chancela mais tint bon ; avec une force terrifiante, il catapulta sa matraque sur la tête de Pertinax.

Son bras fut stoppé en pleine course, le poignet brisé net par la poigne de fer du Dark Angel. Pendant ce temps, pris de panique, le meneur hésitait à tirer. Belisarius se trouvait toujours dans sa ligne de mire, et sa silhouette imposante constituait un obstacle de bonne taille qui occultait presque entièrement le Space Marine ; mais si le Dark Angel n'était pas éliminé rapidement, il n'aurait de toute façon aucun mal à démembrer Belisarius. Résigné, le chef de bande leva son arme et lâcha un tir au jugé, comptant sur sa chance pour lui faire toucher la bonne cible.

La salve de plasma atteignit Belisarius entre les omoplates, vaporisant le torse du géant en une gerbe de sang écarlate. Profitant de ce répit, Pertinax put enfin dégainer l'Epée de Justice ; il bondit vers la colonne la plus proche, devant laquelle se tenait un autre homme de main.

Terrorisé, le criminel actionnait la détente comme un forcené, déchargeant son pistolet laser à bout portant dans une orgie de tirs saccadés. Sans résultat. Pertinax le décapita prestement d'un revers du bras ; au passage, la lame plusieurs fois millénaire vint mordre dans la colonne de pierre et y traça un profond sillon.

Alerté par le sifflement aigu caractéristique d'une arme à plasma en cours de rechargement, le Grand Maître conserva son élan et se glissa derrière le pilier. Des éclats de roche volèrent en tous sens tandis que des tirs de laser s'écrasaient sur la colonne et en détruisaient les élégants bas-reliefs. Presque aussitôt, une décharge de plasma bleuté faisait éclater la pierre.

Avec des réflexes foudroyants, Pertinax surgit du couvert, se précipitant droit sur un nouvel adversaire que d'un puissant coup d'estoc il empala pour le compte. Le Grand Maître fit pression sur l'Epée de Justice pour la dégager ; les servomoteurs de son armure et le champ disruptif de l'arme firent le reste. La lame se fraya un chemin vers le haut, découpant l'abdomen et la cage thoracique du criminel jusqu'à l'épaule, pour finalement jaillir à l'air libre en éclaboussant les environs.

Le corps mutilé n'avait pas encore entamé sa chute vers le sol que le Grand Maître lui avait déjà arraché son pistolet laser. Il abattit le dernier homme de main d'un tir en pleine tête avant de se retourner vers le chef de bande.

Celui-ci décida de tenter sa chance. Il pointa son pistolet à plasma pour exécuter un nouveau tir. Mais alors que son index se raidissait sur la détente, il ressentit une vive douleur qui lui fit lâcher prise : plus rapide, le Dark Angel l'avait touché au bras et ainsi désarmé. La fuite devenait un choix évident.


- Pauvre inconscient, grinça Pertinax.

D'un geste négligent, il fit décrire un arc à l'Epée de Justice, sectionnant les pieds du brigand et le jetant au sol en pleine course. L'homme s'étala de tout son long avec un gémissement pathétique.

Le Grand Maître jeta le pistolet laser devenu inutile et retourna le blessé du bout du pied ; le criminel bascula sur le dos. Comme l'homme faisait mine de se débattre, Pertinax cala son pied sur sa poitrine, le plaquant au sol pour de bon. Ceci fait, le Dark Angel entreprit d'examiner son prisonnier.

Un détail attira son attention : le col entrouvert du chef de bande laissait apparaître un tatouage, discret mais reconnaissable entre mille. L'Aquila de la Garde Impériale. Un vétéran des troupes impériales reconverti dans les activités criminelles ? Possible. Et pourtant, cette explication ne satisfaisait pas entièrement Pertinax.


- Qui t'envoie, crapule ?

- Je vais crever, protesta le malheureux. Je vais crever !

- Pas si tu es soigné rapidement, mentit Pertinax. Parle.

- Va te faire foutre, Marine !

Pertinax aurait volontiers prolongé l'interrogatoire, mais il se rendit compte que les troupes inquisitoriales arrivaient enfin à la rescousse, sans doute alertées par le bruit de la fusillade. Il n'aurait guère le temps d'obtenir des réponses ; ces maudits Inquisiteurs avanceraient un prétexte fallacieux pour le déposséder de sa proie et la faire disparaître dans l'ombre des Ordos. Agacé, le Grand Maître accrut la pression sur sa jambe et enfonça la poitrine du prisonnier, qui périt sur le coup.

Lorsque les premiers gardes arrivèrent, Pertinax achevait d'épousseter sa cape. L'étoffe blanche était percée en de nombreux endroits, seul témoignage de la violence des combats. Du moins, si l'on exceptait les corps éparpillés un peu partout.


- Que s'est-il passé, monseigneur ? s'enquit le sergent des troupes de choc.

- Une altercation. Ces hommes voulaient s'enrichir de façon malhonnête.

Sans un mot de plus, Pertinax fit volte-face et s'éloigna, laissant aux gardes le soin de nettoyer le carnage.

Non, ces hommes n'étaient pas de simples brigands. Ils étaient trop bien renseignés, trop bien armés. Comment savaient-ils que le jardin ne serait pas surveillé ? Pourquoi voulaient-ils à tout prix prendre leur victime vivante ? Et enfin, comment s'était-ils procurés un tel arsenal ?

La main de Pertinax effleura la matraque énergétique dissimulée sous sa cape. Il savait très bien qui avait monté cette embuscade. Une petite conversation s'imposait.



A suivre...

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26 mai 2010 3 26 /05 /mai /2010 15:53

Pertinax se leva d'une humeur maussade : il n'aurait pas imaginé devoir utiliser son nodule cataleptique au cours d'une mission diplomatique. Bien sûr, le Grand Maître ne souffrait pas à proprement parler du manque de sommeil, mais plutôt de la contrariété occasionnée par la tournure des évènements. Car le Concile se présentait sous un jour nouveau : en lieu et place d'un règlement à l'amiable, les Ordos semblaient privilégier l'affrontement. A ce titre, la présence du chapelain Thargannis attestait des intentions hostiles de l'Inquisition à l'égard des Dark Angels.

Dès son retour du Palais Impérial, Pertinax avait procédé à une inspection poussée de ses appartements. Les auspex de son heaume n'avaient pas tardé à identifier des appareils d'écoute, soigneusement dissimulés derrière les tentures de soie. De toute évidence, la nature prétendûment cordiale de l'invitation inquisitoriale n'était qu'un piège grossier destiné à endormir la vigilance des Impardonnés et à prendre leur ambassadeur au dépourvu. Azrael lui-même ne s'était-il pas laissé berner par les discours mielleux de ses interlocuteurs ? Désormais, Pertinax était résolu à ne baisser sa garde en aucune circonstance.

Le Concile devait se tenir dans un ancien monastère de l'Ecclésiarchie situé non loin de la tour inquisitoriale, aussi l'officier Dark Angel décida-t-il de s'y rendre à pied. Au terme d'un interminable cheminement le long de couloirs sans fin et d'escaliers vertigineux, Pertinax parvint à s'extirper du dédale oppressant de la forteresse et à gagner l'extérieur. Le bas peuple vaquait à ses occupations, grouillant et vociférant dans les rues moites. En dépit des filtres respiratoires de son armure, le Grand Maître pouvait sentir une puanteur âcre attaquer ses narines. Il se sentait infiniment plus à l'aise en ces allées surpeuplées que dans le luxe opulent des édifices inquisitoriaux ; pour la première fois depuis son arrivée sur Terra, Pertinax pouvait échapper aux courbettes faussement révérencieuses de ses hôtes et se mêler aux citoyens ordinaires du siège impérial.

Sur la Sainte Terra, au coeur d'un quartier dominé par les hautes tours de l'Inquisition, la population était appelée à côtoyer les dignitaires de haut rang ; pourtant, la foule s'écartait devant Pertinax, lui ouvrant respectueusement un passage. De temps à autre, un citoyen particulièrement fervent baissait la tête, accompagnant ce geste de dévotion d'une prière murmurée du bout des lèvres.

A bien y réfléchir, il n'y avait là rien d'étonnant. Depuis l'Hérésie, aucun Chapitre n'était autorisé à déployer des troupes sur Terra sans l'assentiment direct des Hauts Seigneurs. Ainsi, le bas peuple pouvait s'habituer aux allées et venues des cardinaux, des nobles et des diplomates, mais les Space Marines resteraient à jamais auréolés de légende à ses yeux. Comment pouvait-il en être autrement sur un monde où chaque monument, chaque statue chantait la gloire des Légions de l'Empereur et de leur victoire finale sur le Renégat Horus ?

Pertinax obliqua sur la gauche et s'engouffra dans une grand-rue qui longeait le mur d'enceinte du monastère. Les pierres blanches, mal dégrossies et usées par le temps, contrastaient avec la splendeur sinistre des bâtiments avoisinants. Et pourtant, l'édifice religieux éclipsait tous les autres tant sa clarté le mettait en valeur. En guise de porte, le mur présentait une simple ouverture surmontée de bas-reliefs décatis. Le Grand Maître tenta d'en identifier le motif, mais en vain : les nouveaux propriétaires n'avaient pas daigné l'entretenir, et l'arche tout entière ne tarderait pas à s'effondrer sous le poids des ans.

Au-delà du mur d'enceinte, une promenade couverte entourait un vaste jardin. Pertinax en fut abasourdi : le sol de Terra était stérile depuis des millénaires, bien trop acide pour accueillir le moindre brin d'herbe. Par quel prodige cet ilôt de verdure était-il préservé dans la pénombre des ruches surpeuplées ? Tandis qu'il marchait le long de la promenade, le Dark Angel laissa son regard vagabonder sur les colonnes de pierre qui bordaient le chemin. Bien qu'irrémédiablement abîmées par l'atmosphère délétère, celles-ci arboraient encore fièrement la fleur de lys de l'Adepta Sororitas.

Ainsi donc, le monastère était en fait un couvent. Comment l'Ecclésiarchie avait-elle pu céder un tel édifice à l'Inquisition ? Les cardinaux clamaient à l'envi que leur étroite collaboration avec l'Ordo Hereticus résultait de leurs idéaux communs de respect de la sacro-sainte doctrine impériale. Mais en pratique, cette collaboration se manifestait souvent par une prudente soumission de l'Ecclésiarchie aux ordres d'un Inquisiteur de passage. Quel triste sort pour les soeurs de bataille que de voir leurs installations militaires ainsi livrées en pâture aux laquais des trois Ordos ! A n'en pas douter, tel était le sort que l'Inquisition réservait au Roc et à l'ensemble des forteresses-monastères de l'Adeptus Astartes.

Pertinax atteignit enfin le bâtiment principal. L'essentiel de l'espace intérieur était occupé par le grand amphithéâtre où devait se tenir le Concile. Bien que Pertinax fût en avance sur l'heure prévue, il constata que de nombreux Inquisiteurs l'avaient précédé. Vêtus de costumes hétéroclites et colorés, hommes et femmes se livraient à de discrets conciliabules. Chaque groupe se tenait soigneusement à l'écart des autres, jetant de temps à autre un regard inquiet aux alentours. Bien avant l'ouverture officielle des discussions, des alliances étaient forgées et des votes arrangés. Thargannis était là, lui aussi, en grande conversation avec un trio de vieillards. L'assemblée en elle-même ne serait-elle donc qu'une mascarade, un vulgaire simulacre de débat ? Pertinax s'était attendu à de telles simagrées, mais son dégoût n'en était pas moins grand ; aussi prit-il le parti de se diriger sans mot dire vers le premier rang de sièges. Là, il choisit une place au hasard et s'y assit prestement.

Il attendit un long moment que ses hôtes se décidassent à mettre un terme à leurs tractations. Finalement, les groupes se dispersèrent, et chacun regagna sa place dans un indescriptible brouhaha. Tandis que l'amphithéâtre retrouvait un calme relatif, l'officier Dark Angel estima plus diplomate d'ôter son heaume et de le poser à côté de lui, par égard pour les règles protocolaires.

Un vieil homme s'avança sur l'estrade. Grand, sec, il parlait d'une voix forte et empreinte d'autorité. Un Grand Inquisiteur, sans doute. En tout cas, il semblait avoir été désigné par ses pairs pour présider le Concile.


- Mes très chers frères, mes très chères soeurs. Soyez les bienvenus en ce Concile de la Très Sainte Inquisition. Au cours des prochains jours, nous allons apporter une réponse à toutes les questions oeucuméniques connues et déterminer la doctrine à faire appliquer d'un bout à l'autre de notre glorieux Imperium pour les années à venir. Je suis particulièrement heureux que les trois Ordres aient répondu à notre invitation, et j'adresse à chacun d'entre vous mes respects les plus profonds et les plus sincères. Mes amis, il est temps de commencer. Inquisiteur Weiss, je vous cède la parole.

Sur ces mots, l'homme s'esquiva, laissant la parole au premier orateur. Pertinax s'attendait à être présenté à l'assemblée, ou à être accueilli d'une façon ou d'une autre ; que ses hôtes se permissent de l'ignorer l'agaçait au plus haut point, mais il n'en laissa rien paraître.

Le Grand Maître ne tarda pas à découvrir qu'un Grand Concile est une manifestation où beaucoup parlent, mais où personne n'écoute. Les orateurs se succédaient à la tribune, abordant des sujets vains et abscons dans l'indifférence générale. Ainsi cet Inquisiteur qui se demandait si les croyances en vigueur sur le monde éloigné de Virago devaient être considérées comme hérétiques ; la population locale adorait un dieu unique, théoriquement compatible avec la doctrine générale de l'Ecclésiarchie au sujet des variantes locales du credo impérial, à ceci près que la société matriarcale de Virago ne pouvait concevoir qu'un dieu de sexe féminin. Toute la question était de savoir s'il était tolérable d'assimiler l'Empereur, père de l'Humanité, à la Sainte Mère du peuple de Virago. Dans la négative, les cent millions d'habitants de Virago devraient être éliminés au plus vite, ou à la rigueur recyclés en serviteurs mécanisés.

Pendant ce temps, les messes basses se poursuivaient dans les rangs du fond. Livres et documents étaient échangés au vu de tous, sans que quiconque ne trouvât à y redire. Pour Pertinax, un tel désordre était tout bonnement insupportable. Mais plus insupportable encore était le fait que nul ne semblait décidé à aborder la question de la disparition de Teufelgarten.

Soudain, Pertinax fut victime d'une violente migraine. Il faillit tout d'abord attribuer ce phénomène au vif agacement qui menaçait de le submerger. Mais il se ravisa. D'un air insouciant, il se saisit de son heaume, faisant mine de l'examiner ; puis il s'en coiffa de façon mécanique. La douleur cessa aussitôt.

Des psykers ! Quelque inconscient avait tenté de sonder son esprit. Ces maudits Inquisiteurs ne reculeraient-ils donc devant rien ? Faute de preuves tangibles, Pertinax devait se résoudre à faire comme si de rien n'était. Mais il porterait désormais son heaume protecteur en dépit du protocole.

Comme le craignait le Grand Maître, la journée fut interminable et se clôtura sans que lui ou Thargannis ne fût interrogé ou même pris en considération. Probablement la tactique d'usure déployée par l'Inquisition depuis l'arrivée de Pertinax sur Terra. En tout état de cause, l'officier en était réduit à espérer que son cas serait traité le lendemain.

La séance était à peine levée que les convives reprenaient leurs discussions passionnées en sous-main. Pertinax se leva en silence et entreprit de quitter le couvent au plus vite. C'est animé de sombres pensées qu'il parcourut à nouveau le pourtour du jardin.

Pensées qui furent interrompues brutalement. Six hommes venaient d'apparaître tout autour de lui, jusque là dissimulés par autant de colonnes de pierre. Au vu de leurs accoutrements débraillés, il devait s'agir de quelconques manants. Ou plutôt de quelconques brigands, car trois d'entre eux étaient armés de pistolets. Plus inquiétant, deux autres portaient des armes blanches parcourues d'éclairs et bourdonnant d'énergie. Quant au dernier, qui semblait jouer le rôle de chef, il brandissait une arme plus redoutable encore.


- Plus un geste, Marine. Tu sais ce que j'ai là, n'est-ce pas ? C'est un pistolet à plasma. Un seul mouvement, et je te pulvérise, avec ou sans armure.


A suivre...

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25 mai 2010 2 25 /05 /mai /2010 16:17

La luminosité décrût soudainement : le couloir débouchait sur une pièce sombre aux proportions gigantesques. De forme circulaire, celle-ci s'étendait sur une telle surface qu'elle aurait pu abriter une ville entière sous son vaste dôme. Une myriade de torches couvrait les hauts murs de pierre ; petites et lointaines, les flammes dansaient dans la pénombre comme autant d'étoiles dans la nuit.

Une foule innombrable s'entassait religieusement au pied d'un immense édifice pyramidal. Engendrés par le souffle haletant de milliers de pèlerins, des nuages de condensation dérivaient paresseusement sous le dôme, retombant parfois en pluie sur la masse grouillante des fidèles.

Le petit groupe de dignitaires se figea sur place, réduit au silence par un tel spectacle. Dans son émerveillement, Pertinax remarqua de petites créatures ailées qui voletaient de-ci de-là ; il dut faire usage des auspex de son heaume pour reconnaître des chérubins mécanisés. Ceux-ci surveillaient la foule d'un oeil attentif, à l'affût du moindre comportement suspect. A n'en pas douter, il leur suffisait d'un signe pour alerter les Custodiens qui régnaient en maîtres sur ce lieu sacré.

Tandis qu'il reprenait la marche à la suite de ses compagnons de pèlerinage, le Grand Maître revint aux interrogations qui le taraudaient. L'Inquisition voulait-elle transformer le Concile en procès et soumettre à jugement le Chapitre des Dark Angels ? Cela défiait toute logique. Azrael n'avait-il pas envoyé Pertinax sur Terra dans un souci de bonne entente avec l'Inquisition ? Aux dires du Grand Maître Suprême, l'Ordo Hereticus souhaitait uniquement sauver la face et ne demandait qu'à croire les explications apportées par Pertinax quant à la disparition de Teufelgarten. Alors, pourquoi convoquer un Black Templar en sus ?

Pertinax fronça les sourcils. Il se faisait peut-être du souci pour rien ; après tout, si l'Inquisition cherchait à faire tomber les Dark Angels en disgrâce, il lui suffisait de faire comparaître un Space Wolf. Les barbares sans cervelle de Fenris auraient sans doute beaucoup à dire au sujet des Fils du Lion.

Mais quelle crédibilité auraient-ils ? La rivalité qui opposait Dark Angels et Space Wolves était aussi ancienne que l'Imperium ; et nul ne l'ignorait sur Terra. En revanche, le différend causé par la destruction de l'Ophidium Gulf des Black Templars était d'une nature bien plus confidentielle, car ni les Dark Angels ni les Templiers n'avaient souhaité en faire étalage. De fait, le témoignage à charge d'un Black Templar paraîtrait tout aussi objectif que celui d'un autre Astartes. Etait-ce à dire que certains membres de l'Inquisition avaient eu vent du conflit larvé qui opposait les deux Chapitres et avaient décidé d'en tirer parti ? Le seul moyen de le savoir avant la tenue du Concile était sans doute de mener une entrevue discrète avec le chapelain Thargannis. Hélas, celui-ci était en grande conversation avec Dolokine ; ou plutôt, il subissait avec flegme le soliloque interminable de la Comtesse.

Les dignitaires progressaient au milieu de la populace en prière. Les pèlerins issus du bas peuple devaient en effet s'arrêter devant la pyramide ; seuls les citoyens impériaux de haut rang pouvaient entreprendre l'ascension de son grand escalier et se présenter devant la Porte d'Eternité. Quiconque viendrait à violer cette loi sacrée goûterait au tranchant des hallebardes de l'Adeptus Custodes.

Entre temps, les bons mots de la Comtesse n'avaient pu arracher au Black Templar le moindre rire, ni même un vague témoignage de sympathie. Jetant un rapide coup d'oeil aux alentours, Dolokine ne tarda pas à remarquer que Pertinax était isolé. Faute de mieux, elle obliqua vers lui, le gratifiant d'un large sourire. L'officier Dark Angel tenta de l'ignorer, mais il en fallait plus pour décourager la noblesse impériale.

Synnia Dolokine était une jeune femme de grande taille, à la silhouette fine, et plutôt séduisante malgré l'épais maquillage qui dissimulait ses traits. Vêtue de riches étoffes colorées, couverte de bijoux précieux, elle affichait son rang avec fierté et discourait avec passion de sujets qu'elle ne connaissait pas. Pertinax ne tarda pas à fermer son esprit, laissant les mots ricocher sans effet sur ses oreilles.

Le Généralissime Pollant fut le premier à atteindre le grand escalier. De part et d'autres des innombrables marches, d'antiques bannières et étendards s'alignaient à perte de vue, témoignages solennels à la gloire de régiments aujourd'hui disparus ou de héros tombés au champ d'honneur. Ici ou là trônait un casque, une épée ou quelque relique ayant appartenu à un courageux serviteur de l'Empereur.


- Bon, lâcha la Comtesse, voilà qui fut fort intéressant, et je m'en retournerai comblée par ce pèlerinage. Faisons donc demi-tour, nous avons vu tout ce qu'il y avait à voir ; franchement, qui s'intéresse à ces oripeaux poussiéreux et autres breloques sans valeur ?

Silence et consternation s'abattirent sur les dignitaires comme la foudre. Tous firent volte-face, dévisageant Dolokine avec stupeur. Pollant suffoquait de rage, comme en attestait son visage cramoisi. La Comtesse éclata de rire.

- Allons, Pollant, vous n'allez pas nous faire une...

- SILENCE ! rugit Pertinax.

La jeune femme sursauta et amorça un mouvement de recul tandis que le Grand Maître avançait sur elle.


- Comment osez-vous souiller la mémoire des héros qui ont forgé notre glorieux Imperium ? C'est une insulte à l'Empereur Lui-même !

Pertinax écarta un pan de sa cape pour se saisir de l'Epée de Justice. Prise de terreur, Dolokine trébucha. Agitée de sanglots, elle rampa sur quelques mètres avant de réussir tant bien que mal à se mettre à genoux et à bredouiller quelques excuses. De chaudes larmes coulaient le long de ses joues, détruisant le long travail de maquillage pour lui donner un aspect grotesque.

- Mes mots... mes mots ont dépassé ma pensée. Je... je vous présente mes plus humbles excuses, mes seigneurs.

Mes seigneurs ? Tournant la tête, Pertinax constata que Thargannis se tenait à côté de lui. Des poings du chapelain avaient jailli de longes griffes crépitantes ; de toute évidence, le Black Templar envisageait lui aussi de mettre un terme à l'existence de la Comtesse.

Les deux Astartes se dévisagèrent un instant. Le Dark Angel rengaina sa lame ; Thargannis rétracta ses griffes d'adamantium. Dolokine en profita pour déguerpir sans demander son reste, trop humiliée pour songer à tenir son rang face aux autre dignitaires. Pertinax la laissa disparaître dans la foule ; il fixait Thargannis.


- Je vois que nous avons quelques valeurs communes, frère chapelain.

- Nous sommes tous au service de l'Empereur, rétorqua le Black Templar d'une voix glaciale.

- Et nous devons tous deux honorer une invitation de l'Inquisition. Je ne crois pas qu'il s'agisse d'une coïncidence.

- Je ne suis qu'un humble pèlerin de passage sur la Sainte Terra. Le hasard a voulu qu'un Concile se tienne au même moment. Pourquoi ? Tes raisons seraient-elles... différentes, frère Dark Angel ?

Pertinax réprima une grimace. Il fixait toujour le heaume à tête de mort du chapelain, symbole de sa charge et de son dévouement à l'Empereur.

- Non. Je ne suis moi-même qu'un simple pèlerin.

- Dans ce cas, conclut Thargannis, il faut bien admettre qu'il s'agit d'une coïncidence.

Les deux Astartes se tenaient face à face, les regards rivés l'un à l'autre en signe de défi. Aucun des deux officiers ne pouvait détourner la tête sans sacrifier à son honneur ; aucun des deux ne pouvait s'attaquer à l'autre sans devenir coupable aux yeux de Terra.

Par bonheur, Pollant avait compris ce qui se tramait. Il intervint avec une fausse bonhomie qui ne trompa personne mais eut au moins le mérite de briser le statu quo.


- Bon débarras, mes seigneurs. Cette harpie m'était insupportable. Mais n'est-ce point la garde custodienne que j'aperçois là-haut ?

Saisissant l'excuse offerte, les Astartes se retournèrent vers le grand escalier. A mi-hauteur de la pyramide se dressaient deux imposantes silhouettes. Les hallebardes Nemesis et les armures d'or surmontées de cimiers rouges les désignaient à coup sûr comme des membres de l'Adeptus Custodes, la garde personnelle de l'Empereur. Chacun de ces hommes était un combattant d'élite, un guerrier exceptionnel à même de rivaliser avec les meilleurs Dark Angels.

Pertinax, Thargannis, Pollant, Lucretius et Sigalius entamèrent l'ascension des marches. La pyramide s'élevait haut, très haut sous le dôme ; elle dépassait même les nuages de condensation et surplombait la foule massée en contrebas. Combien de bannières sacrées, combien de saintes reliques étaient-elles entreposées ici ? Combien de soldats mourraient encore pour la gloire de l'Empereur ? Pertinax n'aurait su le dire. Chaque jour, des millions d'hommes et de femmes périssaient pour le salut de l'Imperium. Il en était ainsi depuis dix millénaires, et il serait ainsi jusqu'à la fin des temps.

Les dignitaires parvinrent enfin au sommet des marches. Là, devant eux, se dressait la Porte d'Eternité, si haute et si large qu'un Titan aurait pu la franchir. Pourtant, nul ne savait ce qui se trouvait au-delà, à l'exception des Custodiens et de quelques rares élus qui, seuls, avaient le droit de pénétrer dans le Saint des Saints.

Satisfaits, le Lexmécanicien et l'Adepte de Première Classe rebroussèrent chemin. Mais pour Pollant et les deux Astartes, le pèlerinage n'avait pas encore touché à son terme. La tradition voulait que tout combattant de haut rang se présentât devant la Porte d'Eternité pour demander audience à l'Empereur ; bien sûr, la demande était toujours refusée, mais elle n'en était pas moins incontournable.

Le Généralissime était épuisé par son ascension, et les deux Astartes le soutinrent sur les derniers mètres. Haletant, le visage luisant de sueur, Pollant ôta sa casquette et posa un genou à terre. Pertinax et Thargannis l'imitèrent, se découvrant devant les douze Custodiens en faction.


- Qui es-tu ? demanda l'un des gardes de sa voix tonitruante.

Pollant se redressa, brandissant son bâton de maréchal.


- Je suis le Généralissime Pollant, commandant la IVe Armée. Je demande audience à l'Empereur.

Pertinax se dressa à son tour. D'un geste vif, il dégaina l'Epée de Justice et la leva devant lui.

- Je suis le Grand Maître Caius Pertinax, du Chapitre des Dark Angels. Je demande audience à l'Empereur.

Thargannis se leva lui aussi. Il se saisit de son Crozius Arcanum et le présenta aux Custodiens.

- Je suis le Maître de la Foi Thargannis, du Chapitre des Black Templars. Je demande audience à l'Empereur.

Un long silence leur répondit. Puis le garde reprit la parole.

- Soldat, l'Empereur a entendu ta requête. Il ne te recevra pas, mais désormais Sa bénédiction t'accompagnera à jamais. Va, retourne d'où tu viens.

Les trois officiers s'inclinèrent et firent demi-tour. Un long chemin les attendait jusqu'à l'extérieur, sans parler du vol de retour jusqu'à leurs logements respectifs. Ainsi s'achevait le pèlerinage sur Terra. Pertinax était empli de fierté, mais au fond de lui subsistait une vague déception. Il aurait tant aimé franchir la Porte d'Eternité !



A suivre...

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24 mai 2010 1 24 /05 /mai /2010 20:22

- En formation !

Réagissant instantanément à l'ordre de leur capitaine-commissaire, les Arbites s'élancèrent au-devant de la porte, formant une solide ligne d'uniformes noirs face à la foule en marche. Ici et là, quelques pèlerins osèrent émettre une protestation ; ils furent aussitôt roués de coups et réduits au silence. Puis la phalange noire fit mine d'avancer, repoussant pas à pas la masse humaine à grands renforts de coups de crosse. Von Ravenstein lui-même n'était pas en reste, jouant de la matraque pour donner l'exemple à ses troupes. Les pèlerins finirent par refluer sous la violence de l'assaut, libérant l'accès au Palais.

Pertinax suivit les autres dignitaires vers la large porte. La Comtesse Dolokine semblait ravie que sa longue attente fût enfin terminée ; en tout cas, elle ne manquait pas de le faire savoir. Apparemment persuadée que son auditoire buvait ses paroles, elle déversait un flot ininterrompu de banalités de sa voix aigrelette. Tandis que le petit groupe suivait la muraille sous le couvert du rideau policier, Pertinax se réfugia dans l'introspection. A dire vrai, il était impressionné par le sang-froid des Arbites : le capitaine-commissaire et ses hommes se dressaient seuls face à plusieurs dizaines de milliers de civils et parvenaient malgré tout à maîtriser la situation sans trop de difficulté. Certes, les pèlerins ne constituaient jamais qu'un troupeau servile affaibli par des semaines de marche et de privations ; mais leur nombre était suffisant pour transformer tout mouvement de panique en une vague irrésistible que rien n'aurait pu contenir.

Comme pour donner raison à Pertinax, un début d'agitation se fit jour dans la foule. Le gros de la populace continuait à avancer, incapable de deviner que les premiers rangs avaient stoppé à quelques pas du Saint Edifice. Pris au piège, les rangs intermédiaires étaient écrasés dans un véritable étau ; quelques malheureux vinrent à trébucher, et furent aussitôt piétinés à mort malgré des hurlements désespérés. Lentement, la masse humaine reprit sa progression vers l'avant.


- En joue ! lâcha Von Ravenstein.

Comme un seul homme, les Arbites pointèrent leurs fusils. Terrorisés, les pèlerins des premiers rangs voulurent fuir, poussant de toutes leurs forces vers l'arrière pour freiner le mouvement. En vain : la foule continuait à avancer.


- Feu !

Dans une gerbe de détonations, la salve coucha les trois premiers rangs. Les Arbites utilisaient traditionnellement des cartouches perforantes à haute vélocité, histoire d'éliminer à coup sûr les criminels récalcitrants ; sur une foule compacte et dépourvue de protection, les effets de ces munitions étaient épouvantables. Les pèlerins refluèrent, à toutes jambes cette fois-ci : le bruit des coups de feu avait retenti suffisamment loin pour entraîner un mouvement général.

- Feu !

La seconde salve frappa les fuyards dans le dos et en déchiqueta un bon nombre. La Comtesse gloussa, sans doute amusée par la vue de ces manants qu'on réduisait en charpie.

- Halte au feu, intervint Von Ravenstein. Ramassez-moi ces macchabées et reformez les rangs !

Tandis que les Arbites se déployaient pour repousser les cadavres sur le bas-côté, le capitaine-commissaire accompagna ses hôtes jusqu'à la porte.

- Veuillez excuser cet incident. Aucun de vous n'est blessé, j'espère ?

- Pensez-vous, répondit la Comtesse avec une moue enjôleuse, c'était fort distrayant. Allons, Von Ravenstein, vous êtes bien galant homme, en vérité. Vous Nous ferez bien le plaisir de Nous accompagner pendant cette visite ?

- Hélas non, madame, je crains de ne pouvoir pénétrer dans le Palais Impérial. Il s'agit là d'une prérogative exclusive de l'Adeptus Custodes.

Sur ces mots, le capitaine-commissaire exécuta un bref salut et retourna parmi ses hommes. Dolokine haussa les épaules et s'engouffra dans le Palais, bientôt imitée par les autres dignitaires.

Ils marchaient le long d'un large couloir. Incroyablement haut de plafond et bordé de statues cyclopéennes, celui-ci se reflétait tout entier dans le sol de marbre poli. Il en résultait une impression étrange de volume et de lumière : Pertinax et les autres semblaient flotter dans les cieux. En dépit de son immensité, le corridor était pourtant d'une sobriété frappante. Nulle fantaisie colorée ne venait troubler la froide splendeur de ces lieux. En un sens, Pertinax retrouvait la grandeur et la gloire des halls du Roc ; mais tandis que la Tour des Anges était plongée dans une pénombre éternelle, le Palais Impérial baignait dans une douce lumière blanche.

Hélas, la Comtesse Dolokine ne tarda pas à retrouver ses esprits ; sitôt l'émerveillement passé, elle reprit le cours de son monologue. Visiblement désireux de ne pas être choisi pour confident, le Généralissime Pollant vint marcher aux côtés du Dark Angel.


- Messire Pertinax, je peux me tromper, mais ne seriez-vous pas le commandant de la IIIe Unité d'Assaut Planétaire ?

- En effet.

Etonné d'être ainsi reconnu, Pertinax s'intéressa pour la première fois à son interlocuteur. Pollant était un petit homme trapu et sans âge, littéralement couvert de médailles et vêtu d'un long manteau sur son uniforme olive. Les cheveux argentés du Généralissime contrastaient avec la jeunesse apparente de ses traits, ce qui trahissait à coup sûr un usage intensif de drogues Juvenat. Pour autant, et même si l'essentiel de son visage disparaissait sous la visière de sa casquette honorifique, Pollant avait un regard perçant qui débordait de vivacité.

- Dans ce cas, je vous présente mes respects au nom de mon état-major. Peut-être vous rappelez-vous le 112ème Cadien, qui se battit sur l'un de vos flancs lors de la campagne d'Hécate, il y a trois années de cela ? Ce régiment faisait partie de mes effectifs.

Tandis que Pollant parlait, ses mains gantées de cuir couraient le long de son bâton de maréchal. Sans doute l'évocation de batailles passées réveillait-elle chez lui une certaine nostalgie des combats. Pour Pertinax, il n'y avait cependant pas de quoi pavoiser : il se rappelait parfaitement les piètres performances du 112ème Cadien. Les Dark Angels avaient compté sur cette unité mécanisée pour boucler l'encerclement d'un contingent rebelle et permettre à la IIIème Unité d'Assaut Planétaire d'écraser l'ennemi sans coup férir. Malheureusement, le moral du 112ème avait flanché dès les premières escarmouches, et le régiment avait battu en retraite malgré des pertes minimes. Pertinax avait finalement obtenu la reddition des rebelles, mais ceux-ci auraient pu profiter de la brèche pour se dégager et gagner une position fortifiée. Il s'en était fallu de peu.

- Oui, je me souviens très bien de cette unité.

Le Grand Maître préféra ne rien ajouter, soucieux de ne pas humilier le Généralissime inutilement. Sans se démonter, ce dernier hocha la tête et poursuivit son propos.

- Eh bien, sachez que le 112ème a été détruit l'année dernière, laminé par une invasion ork. Et ce n'est pas une grand perte. Il faut bien avouer que ce régiment ne valait pas tripette : une chaîne de commandement valable, un équipement de qualité, mais les hommes n'avaient pas la trempe de vrais soldats.

Pertinax regretta aussitôt d'avoir douté de la lucidité de Pollant. Les hauts officiers de la Garde avaient pour habitude de se gargariser avec une suffisance ronflante, tout juste égalée par leur incompétence. Mais le Généralissime était d'une tout autre étoffe... ce qui lui attira immédiatement la sympathie du Grand Maître.

Entre temps, Dolokine semblait s'être lassée de la compagnie du Lexmécanicien. Tout comme son comparse de l'Administratum, Lucretius se montrait peu disert et ne répondait aux plaisanteries de la Comtesse que par des hochements de tête inexpressifs. Vexée, Dolokine décida de reporter ses faveurs sur le Chapelain Thargannis, lequel accueillit ce privilège avec un silence résigné.


- Voilà des décennies que je n'avais pas eu de permission, continuait Pollant.

Le Généralissime fit claquer son bâton sur la base de sa jambe droite, qui émit un bruit métallique retentissant. Pollant eut un rire sans joie.


- Cinquante ans au service de l'Empereur, et c'est mon premier membre cybernétique. A mon âge, les greffes ne prennent pas très bien ; ces foutus médecins m'ont contraint au repos. Du coup, j'en profite pour faire mon pèlerinage... à quelque chose malheur est bon !

Le petit groupe atteignait une portion du couloir dédiée aux Primarques. De part et d'autre de l'allée centrale, les statues se faisaient face avec solennité. Il ne s'agissait pas d'images pompeuses des grand héros de l'Imperium ; évitant ce lieu commun quelque peu vulgaire, les sculpteurs avaient choisi de placer chaque Primarque au centre d'une allégorie qui présentait au visiteur son oeuvre majeure ou son rôle historique. Même la disposition des statues s'inscrivait pleinement dans cette optique et concourait à l'aspect narratif de l'ensemble. Ainsi, le Lion faisait face à Leman Russ, son regard pensif et sérieux pointé comme un défi vers le barbare rugissant ; un peu plus loin, Rogal Dorn dévisageait Roboute Guilliman, lisant avec scepticisme le Codex Astartes brandi par le Primarque des Ultramarines.

Pertinax et le Généralissime observèrent un silence respectueux tandis qu'ils dépassaient les sculptures monumentales. Puis Pollant reprit le cours de ses pensées.


- Et vous, messire Pertinax ? Je suis toujours étonné de voir des Astartes de votre rang si loin de leur Légion.

- Je jouis d'une autorisation spéciale de mon Chapitre. Le pèlerinage est un devoir sacré pour tout serviteur de l'Empereur, quel que soit son rang.

- Je vois, je vois... Dommage que votre visite coïncide avec la tenue du Concile inquisitorial. Je ne puis imaginer perspective plus ennuyeuse que de côtoyer des Inquisiteurs plusieurs jours durant.

Pertinax contint son agacement, mais son ton se fit plus rude.

- Comment savez-vous que je dois participer à ce Concile ?

Pollant eut l'air sincèrement surpris par la réaction du Grand Maître.

- Ma foi, c'est votre homologue Black Templar qui nous en a parlé tout à l'heure.

- Vraiment ? Je suis étonné qu'un chapelain Black Templar soit si bien renseigné sur mes allées et venues.

- Il n'y a là rien de secret : deux insignes représentants de l'Adeptus Astartes étant de passage sur Terra, il semble naturel que l'Inquisition les invite à sa petite sauterie.

Pertinax étrécit les yeux sous son heaume. Ainsi, ce Thargannis devait également participer au Concile. Pourquoi n'en avait-il pas été informé ? L'Ordo Hereticus avait-il sciemment dissimulé cette information aux Dark Angels ? Dans l'absolu, il n'y avait rien d'étonnant à ce qu'un chapelain vienne en pèlerinage sur la Sainte Terra ; plus que tout autre Astartes, il se devait d'entretenir sa foi et son bien-être spirituel. Mais que le seul autre Marine invité au Concile fût un Black Templar relevait d'une coïncidence pour le moins curieuse. Peut-être le Chapitre à la croix noire était-il lui aussi l'objet d'une enquête inquisitoriale ? A moins que la présence de Thargannis ne fût liée à la venue de Pertinax...

Le Dark Angel sentit son sang se glacer.

... à moins que Thargannis ne fût un témoin à charge.



A suivre...

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18 mai 2010 2 18 /05 /mai /2010 18:31

Pertinax se réveilla en sursaut, la main déjà serrée sur la garde de l'Epée de Justice : la porte s'ouvrait sur une silhouette richement vêtue. Ce n'était pourtant qu'un serviteur.

- Monseigneur, veuillez pardonner mon intrusion. Conformément à votre demande, je vous informe que le jour vient de se lever.

Précision toujours utile sur la Sainte Terra, d'où le ciel n'est que rarement visible. Et a fortiori lorsqu'on se trouve au coeur d'une sombre forteresse de l'Inquisition...

Le Grand Maître congédia le majordome d'un geste de la main. Le serviteur s'inclina respectueusement et sortit de la pièce à reculons, refermant doucement la porte ornementée.

Pertinax s'extirpa du lit à baldaquins et entreprit de revêtir son armure. Tandis qu'il fixait soigneusement les différentes pièces de céramite, il détailla la pièce du regard. Tant de luxe le laissait pantois. Pas un objet, pas un meuble qui ne fût paré d'or ou de joyaux. Les murs eux-mêmes étaient couverts d'un épais capitonnage de soie rouge maintenu par des clous dorés. L'officier aurait aimé croire que cette pièce n'était qu'une exception, et que ses hôtes lui avaient réservé leur plus belle suite. Mais il savait qu'il n'en était rien. Lors de son arrivée, quelques heures plus tôt, il avait suivi Igor le long de corridors superbes et bordés de colonnes de marbre ; il avait dépassé d'immenses statues, témoignages prétentieux à la gloire de quelque Inquisiteur oublié.

A quoi bon tout cela ? Pertinax avait toujours perçu les Inquisiteurs comme les parangons de l'austérité, sentinelles implacables en charge du maintien de leur sacro-sainte doctrine... sans doute fallait-il que l'Inquisition se réservât l'usage de ce qu'elle proscrivait chez les autres. Avec une grimace de dégoût, le Grand Maître maudit ces hypocrites qui osaient menacer les Légions de l'Empereur depuis le calme feutré de leurs palais ; il lui incombait de protéger les secrets du Chapitre contre les basses manoeuvres politiques de ces misérables.

Pertinax s'enveloppa de sa cape et se couvrit de son heaume. La confrontation attendrait ; pour l'heure, il devait s'acquitter de son devoir de pèlerin. L'Epée de Justice au dos, il marcha résolument vers la porte et l'ouvrit à la volée.

Le majordome se tenait à proximité, impassible dans sa livrée rouge et or.


- Monseigneur, je vais vous escorter jusqu'à votre navette.

Pertinax ne jugea pas utile de répondre et se contenta d'emboîter le pas au serviteur. L'idée qu'il eut besoin d'une escorte lui aurait presque arraché un sourire ; mais il se ravisa bien vite. Les corridors interminables se croisaient selon des angles improbables pour constituer un vaste dédale. Ascenseur après ascenseur, escalier après escalier, le Grand Maître et son guide s'enfonçaient dans les entrailles de l'édifice. Au terme d'un long cheminement, ils se trouvèrent soudain à l'extérieur, sur une plate-forme d'atterrissage juchée à haute altitude.

Un transport Aquila frappé du sceau de l'Inquisition y attendait son passager, tous moteurs à plein régime. Pertinax ignora le majordome qui lui souhaitait une bonne journée, s'engouffrant dans la cabine de la navette prête au décollage. Presque aussitôt, l'Aquila s'arracha à la plate-forme pour entamer un virage serré dans les nuages.

Le Palais Impérial se trouvait à bonne distance de là, et il aurait été vain de vouloir s'y rendre à pied. C'était pourtant le seul choix des pèlerins ordinaires, contraints de parcourir par eux-mêmes les centaines de kilomètres qui séparaient leur but du spatioport le plus proche. Tandis que l'Aquila réduisait son altitude, Pertinax en eut la confirmation au travers du vitrage blindé.

Une véritable foule grouillait entre les bâtiments de pierre, loin en-dessous de l'appareil. Pour la plupart, les citoyens vaquaient à leurs occupations laborieuses au service de l'Administratum. Mais un peu plus loin sur la droite, on distinguait clairement un fleuve humain, populace innombrable et bigarrée serpentant lentement vers les lointaines tours du Palais Impérial. Tant de piété ravissait Pertinax et l'inquiétait à la fois. Que tant d'hommes et de femmes fussent capables d'abandonner leur foyer pour se livrer à un périple si long et si dangereux dénotait une indéfectible loyauté envers l'Empereur ; et pourtant, c'était aussi le signe d'une adoration servile et coupable. Celui qui vénère l'Empereur en tant qu'homme est louable, car il se soumet à son semblable par respect et par admiration de Ses actes ; celui qui Le vénère en tant que Dieu n'est qu'un pion guidé par la peur et l'ignorance, un pion qui pourrait tout aussi bien vénérer d'autres divinités si l'occasion s'en présentait.

Pertinax fut tiré de sa rêverie par l'irruption bruyante de deux Thunderbolt. Les chasseurs coupèrent la trajectoire de l'Aquila en signe d'avertissement, puis vinrent se poster de part et d'autre du transport en attendant son identification. Les trois appareils maintinrent leur cap quelques minutes, cependant que le paysage continuait à défiler rapidement sous les yeux du Grand Maître. Puis les Thunderbolt virèrent de bord, reprenant leur patrouille autour du Saint Edifice.

Tandis que l'Aquila ralentissait et entamait sa descente, le Palais apparut soudain dans toute sa splendeur. De colossales murailles se dressaient d'un bout à l'autre de l'horizon, délimitant une forêt de tours blanches crevant le ciel de leurs flèches acérées. Aussi loin que portait la vue, le Palais Impérial étendait son écrasante immensité. La légende voulait qu'il fût le plus grand édifice de la Galaxie ; ce n'était pourtant pas tout à fait exact. Si le Palais Impérial couvrait en effet la totalité de l'ancienne Europe, il ne pouvait rivaliser avec les Mondes-Forges de l'Adeptus Mechanicus, vastes villes-usines de la taille d'un monde. Néanmoins, et en dépit des incroyables merveilles qu'il avait pu rencontrer lors de ses campagnes, Pertinax était émerveillé. Là, sous ses yeux, sommeillait l'Empereur de l'Humanité, Seigneur de toutes choses et Chef Suprême des Légions Astartes ; en ce lieu mythique s'était déroulée la plus grande bataille de l'Histoire, celle qui avait vu la chute d'Horus et de ses sbires.

L'Aquila se posa doucement sur une aire aménagée à quelque distance de la porte principale. Alors qu'il s'extirpait de la navette, le Grand Maître constata que tout autour de la plate-forme était déployé un cordon de protection. Des dizaines de policiers de l'Adeptus Arbites se dressaient face à la foule pour empêcher la masse aveugle de submerger les quelques navettes qui y stationnaient. De temps à autre, un malheureux pèlerin s'approchait un peu trop et recevait quelques bons coups de crosse en guise de sanction. Un autre contingent d'Arbites, plus important, maintenait la garde devant l'immense porte du Palais.

Une silhouette sombre se dirigeait vers l'officier Dark Angel d'un pas pour le moins martial. Vêtu d'un ample manteau de cuir noir, l'homme salua Pertinax de façon impeccable.


- Capitaine-commissaire Werner Von Ravenstein, à votre service. Nous sommes honorés de votre visite, monseigneur.

- Grand Maître Caius Pertinax, du Chapitre des Dark Angels. Je suis honoré par votre accueil, capitaine-commissaire.

L'Arbites hocha la tête avec satisfaction et invita Pertinax à le suivre.

- L'Inquisition nous avait prévenus de votre arrivée, et nous vous attendions. Dans la mesure du possible, nous essayons de grouper les dignitaires pour faciliter leur passage au travers de la populace.

Von Ravenstein s'arrêta au bord de la plate-forme. Plusieurs hautes personnalités s'y tenaient, leur regard agacé manifestant leur impatience de façon aussi silencieuse qu'ostensible.

- Messire Pertinax, voici la Comtesse Dolokine, du Grand-Duché de Delmian ; le Généralissime Pollant, commandant la IVe Armée ; le Lexmécanicien en chef Lucretius, du Clergé de Mars ; l'Adepte de Première Classe Sigalius, de l'Administratum ; et le Maître de la Foi Thargannis, du Chapitre des Black Templars.

Les deux Space Marines se saluèrent d'un hochement de tête, moins par sympathie que par respect. Un différend opposait les deux Chapitres depuis quelques années ; les Black Templars s'étaient immiscés dans les affaires privées des Dark Angels, ce qui avait contraint les Impardonnés à lancer de vives représailles à l'encontre d'un navire templier.

- Bien, suivez-moi, reprit Von Ravenstein. Nous allons vous ouvrir un passage.


A suivre...

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17 mai 2010 1 17 /05 /mai /2010 08:46

Pertinax répondit lentement, détachant chaque syllabe pour mieux l'asséner de sa voix de stentor.

- Messire Mazen, sachez que je représente la Première Légion de l'Adeptus Astartes, forte de dix mille ans d'Histoire, et qu'à ce titre je ne rends compte qu'à l'Empereur lui-même. Il est donc tout à fait exclu que je m'incline devant un simple serviteur tel que vous. Par ailleurs, c'est en gage d'amitié que les Dark Angels ont accepté la proposition de vos maîtres ; il ne s'agit en aucun cas d'un acte de soumission.

Mazen s'efforçait de rester de marbre, mais son regard acéré en disait long sur sa frustration. Il allait répliquer, mais le Grand Maître ne lui en laissa pas le temps. L'Astartes empoigna fermement la crosse de ses pistolets et les tira de leurs étuis de cuir.

Inconsciemment, Mazen avait tendu la main vers son arme d'ordonnance ; mais Pertinax se contenta de présenter ses armes au jeune aspirant Inquisiteur : une paire de pistolets à plasma Mk II Sunfury. Des objets de toute beauté - et assurément, de grande valeur. Mazen se détendit, arborant un léger sourire et ouvrant les mains pour recevoir les armes du Dark Angel.

Le Grand Maître lâcha trop tôt. Les deux Sunfury tombèrent au sol, où ils rebondirent plusieurs fois avec fracas avant de s'immobiliser sur le métal noir de la plate-forme. Furieux, Mazen contint sa colère et fit mine d'ignorer l'insulte. Bien évidemment, il était hors de question qu'il se baisse pour ramasser les pistolets : c'eut été perdre la face devant le Marine. Bien décidé à reprendre l'ascendant, il désigna la longue lame noire que Pertinax portait dans le dos.


- Votre épée aussi.

- Certainement pas. L'Epée de Justice n'est pas qu'une arme : c'est le symbole de ma charge et de mon autorité. Armure et épée sont indissociables, elles constituent l'uniforme traditionnel de tout officier de haut rang. Je viens sur Terra en pèlerin ; voudriez-vous que je me présente devant l'Empereur sans les attributs d'un Grand Maître ? Il s'agirait là d'une grave insulte envers moi et mon Chapitre.

Comme Mazen demeurait inflexible, Pertinax poursuivit, agacé.

- Jeune imbécile, croyez-vous que l'Inquisition cautionnera les initiatives maladroites d'un sans-grade, au risque de causer un incident diplomatique majeur avec un Chapitre ?

Mazen serrait les dents, incapable de trouver une répartie. Et pour cause : le colosse avait raison. L'Inquisition souhaitait garder de bonnes relations avec les Dark Angels, et la visite de Pertinax répondait au souhait des deux factions. S'il persisitait à faire du zèle, le jeune acolyte risquait fort de voir son accession au rang d'Inquisiteur retardée de plusieurs années. Pire, il risquait de tomber en disgrâce et de rester à jamais un sous-fifre. La mort dans l'âme, il se résigna à capituler.

- Comme vous voudrez, cracha-t-il d'un ton définitif. Igor, ramasse les armes du Seigneur Pertinax, veux-tu.

Jusque là prostré à bonne distance, le serviteur s'avança avec soulagement.

- Non, intervint Pertinax.

Igor s'immobilisa avec un hoquet de surprise.


- Serviteur, tu vas me conduire à mes appartements. Cet entretien n'a que trop duré.

Sur ce, le Grand Maître fit signe au pilote du Thunderhawk. Les moteurs rugirent tandis que l'appareil s'arrachait à la plate-forme et entamait sa lente ascension dans le ciel saturé d'éclairs. Ivre de rage et de frustration, Mazen vit Pertinax et Igor quitter la plate-forme pour rejoindre la quiétude de la forteresse inquisitoriale. Il demeura bientôt seul dans la tempête.

Le regard du futur Inquisiteur se posa sur les deux Sunfury, qui le narguaient toujours à ses pieds.


- Tu me paieras cet affront, Marine, grinça-t-il entre ses dents. Je te le jure !


A suivre...

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